Comment ça peut se traduire dans ce que je fais, tout ça ? Je veux dire, en art ? En « art », en ce qui constitue la majeure partie de ma présence dans les établissements que j'ai fréquentés, jusqu'à maintenant, dans mes études supérieures ? Car ne l'oublions pas, le contexte dans lequel j'écris ces textes, c'est celui-là, celui des études. C'est quelque chose auquel je pense souvent parce que je sais aussi que ça concerne un espace et du temps qui m'ont été conférés, donnés(?) pour que je puisse m'exprimer là-dessus. Par moments, et sans que je ne prenne ce sentiment pour quelque chose de fiable, de raisonnable ou rationnel, il m'arrive de me sentir coupable de ça. Je ne sais pas si je me sens coupable d'être « gâtée », coupable de ne peut-être pas faire toujours un bon usage de ce qu'on me propose. Mais par rapport à qui, par rapport à quoi ? Je ne sais pas si je me sens coupable d'avoir toujours des soucis à régler alors que je me sens aussi tout à fait bien lotie, dans ce contexte scolaire. Suis-je capable de faire ce que l'on attend de moi ? Est-ce que l'on attend quelque chose de moi, d'ailleurs ?
M'a-t-on mise/acceptée (car j'ai quand même candidaté pour en arriver là) dans ce vivier en pensant que j'allais pouvoir y remplir un genre de fonction, un genre de mission ? Ou bien le rapport était-il inversé, est-ce que j'ai donné une impression de certitude et de capacité ? Ou bien c'était, encore une fois, une entente mutuelle ?
Avez-vous déjà eu le sentiment que vous arriveriez mieux à faire quelque chose si on vous ne regardait pas le faire ? Avez-vous déjà eu le sentiment que vous auriez besoin d'une cachette pour mener à bien vos tâches ? Avez-vous eu le sentiment que vos dessins ne sortaient jamais aussi bien que lorsque vous étiez au téléphone, ou pendant que le.ax professeur.ex parle ?
Une fois, un ami, pendant une réunion vouée à discuter des tenants et aboutissants des diverses méthodes/évènements pédagogiques mis en place dans l'école ou lui et moi étudiions, a dit « le système d'évaluation de nos travaux avec des crédits et des notes et des cases à cocher n'est pas compatible avec une pratique sensible » (je ne sais plus s'il avait ponctué le début ou la fin de sa phrase par « pour moi »).
Depuis, je ne cesse d'y penser.
Enfin, ça revient souvent. Parce que le terme « pratique sensible » était bien trouvé, déjà, j'ai trouvé que ça englobait tout ce que ça peut vouloir dire, sans exagération ni lacune ; ensuite, parce que j'ai été rassurée que quelqu'un d'autre que moi le formule. Ça me faisait, ça me fait peur parfois d'avoir l'impression d'être ancrée dans quelque chose qui attend du travail, de l'engagement,
de la capacité de moi. Ça me fait peur quand c'est autant lié à quelque chose de profond et de spontané, et aussi quand il m'est demandé d'écrire un texte réfléxif à ce sujet. Ça me fait un peu peur de performer à un moment donné (bilan, diplôme?) ce pourquoi je suis là, supposément. Comme je l'ai déjà dit plus haut, tout ça, ce sont des réflexions que je ne prends pas forcément comme point de départ ou pierre angulaire dans ma relation avec l'établissement, ou bien avec l'école en règle générale ; mais ce paradoxe, cette dichotomie entre quelque chose qu'on ne saurait/voudrait pas mettre dans une quelconque case ou rattacher à des méthodes, des façons précises de faire, et entre le fait qu'il y ait évaluation et validation...
Pour autant, est-ce que je me sens capable d'y aller seule et de me détacher du cadre ?
Est-ce que je me sens capable de sortir de l'abri ?
Est-ce que je serai seule ?
Est-ce que c'est grave d'être seule, est-ce que c'est ce qu'il me faut d'être seule ?
Est-ce que c'est vraiment possible d'être seule ?
Est-ce que toi aussi, dans la grande maison, tu as un jour ressenti quelque chose du genre ?
Mais qu'est ce que je fais-là, au juste ?
Ce qui fait si peur quand on pose cette question, c'est qu'une personne réponde, peut-être...
Eh bien vas-y, t'as qu'à sortir si vraiment ça ne te plaît pas.
Est-ce que je veux rester si je ne veux pas partir ? Et qu'est ce que ça dit de l'extérieur ?
Je me sens remplie de larmes et de tristesse quand je ne me sens pas à la hauteur