Bon moi personnellement l’amicale du freesquet et plus largement le fait d’être un collectif de teufs/qui fait la fête/qui fait des fêtes ça me procure beaucoup de bonheur autant que beaucoup de vertige, autant que beaucoup de courage et de sensation d’être rassurée quand je pense à l’avenir et que je me dis qu’on est obligé.exs d’arriver à construire des choses ensemble pour se tenir, se maintenir et avancer. Je ne dis pas ça d’une façon dogmatique, je dis ça parce que je sens que ça résonne aussi avec le fait d’être une meuf/une personne qui n’est pas un garçon cis, hétéro, valorisé dans tous les espaces, promu sans avoir à faire trop d’effort.
Ce que je ressens c’est que le fait d’être une meuf qui s’organise et se déter avec d’autres meufs, pour construire ensemble des endroits et des moments qui servent à donner du plaisir et de la bienveillance aux gens, c’est émouvant en même temps d’être vraiment important et ce parce qu’on peut s’en parler quand on rencontre des difficultés liées à tout ce que l’on a envie de combattre, je crois : les relous, les discriminations, les comportements oppressifs, la peur, la honte, le danger…
Quand je pense à la fête et à mes copinexs je pense à l’énergie et je me sens prête à me mettre en mouvement, tête un peu baissée vers l’avant, avec les bras pliés le long de mon corps comme quand je traîne une de ces énormes palettes qui nous servent à construire la table des DJ, le bar pour l’alcool et les cocktails. Je ressens une tension dans les jambes qui me servent à pousser quand il faut porter des trucs lourds et que je me dis que « c’est pour ça que je le fais ». Pour quoi ?
Ça me fascine le fait que les corps des gens mobilisent leur énergie pour créer ces zones et ensuite en profiter et en faire leur endroit de fête. ça m’émeut parce qu’en tant que meuf je crois que le corps il y a trop de choses dans la vie qui m’ont répété qu’il servait à autre chose, à des choses que moi je ne veux pas. Ça m’émeut parce que tous les jours quand je pense à ça je me dis que malgré tout ce qu’on nous répète, on est capables.
Je crois que faire des fêtes ça prouve à tout le monde, y compris nous-mêmes, qu’on est capables. Ça m’est trop important car se rendre compte qu’on est capable c’est arriver à se donner du courage et de la joie. Faire des fêtes par extension c’est arriver à mettre de l’énergie et du temps là où on ne nous a pas forcément demandé d’en mettre ; ça aussi c’est quelque chose d’important, je crois. C’est anti-paralysie d’agir ensemble. On parvient à concevoir des espaces qui ne sont pas forcément productifs en eux-mêmes, mais c’est ça aussi qui est beau : le plaisir, l’adrénaline et l’harmonie proviennent entre autres de cette énergie mobilisée et ne serviront à rien d’autre qu’à exister en eux-mêmes. Je trouve ça très fort en tant que meuf aussi, parce dans la représentation des choses et de la vie qui m’a entourée depuis que je suis petite, ça n’est jamais le cas que pour les garçons.
Se rendre compte qu’on est capable c’est aussi se rendre compte que l’on a pas, ou plus besoin de l’autorisation d’autrui pour faire quelque chose, ou bien qu’au moins, on est en droit de la discuter. C’est ça qui retire la peur de l’action, ou bien la cristallise, d’ailleurs ; mais au moins on comprend pourquoi.
à l'état de brouillon, texte écrit en automne 2021 pour une possible publication dans une revue/travail de réflexion collectif en mixité
choisie sur le sujet des fêtes, de les faire en étant pas un homme cis
Si on veut faire des fêtes libres, collectives, respectueuses, non-commerciales, non-ancrées dans le circuit de l'évènementiel, hors des fonctionnements discriminants, oppressifs, restrictifs, accessibles à toutexs, qui font se sentir en sécurité, avec une scène locale et vivante, indépendantes...
ça en fait des choses mais si on veut faire tout ça, c'est parce qu'on en a envie, c'est parce qu'on en a besoin.
On prend nos mains nos bras nos jambes nos têtes on fait tout pour, on branche les machines on rafistole ce qui doit l'être on allume le moteur et pendant que le soleil fait son tour de la Terre, on aplatit le sol, on s'aime et on rit, et on passe la nuit, et le soleil revient il est orange, il transperce les nuages et nous on l'avait oublié pendant tout ce temps.
On respire l'air de la nuit, on joue aux lucioles et on s'amuse, on s'amuse, on s'amuse, on se donne des remèdes, on se donne de la force...